Impossible d’évoquer le macaron sans parler de la maison Ladurée. Cette petite entreprise familiale a désormais traversé trois siècles, et est depuis devenu un géant de l’industrie agroalimentaire, présent partout dans le monde. Portrait.
Tout commence en 1862, lorsque Louis Ernest Ladurée ouvre une boulangerie à Paris, rue Royale. La Madeleine est déjà un quartier d’affaires très en vogue où se rassemblent les plus grands artisans du luxe du pays. En 1871, alors qu’Haussman redéfinit le visage de Paris, la boulangerie se transforme en pâtisserie suite aux dégâts infligés par un incendie.
Survient ensuite la nouvelle mode des cafés qui supplante celle des salons littéraires. Paris devient peu à peu la capitale mondiale de la fête, du divertissement et des sorties. L’épouse de Louis Ernest Ladurée, Jeanne Souchard, a l’excellente idée de mélanger les genres: pâtisserie et cafés parisiens. C’est la naissance des salons de thé parisiens et le début de la gloire pour l’entreprise. Environ 150 ans plus tard, le nom Ladurée est toujours une référence mondiale pour les amoureux de pâtisserie, et un porte-étendard du luxe à la française.
Tout cela c’est bien bon, mais… le macaron?
Il est difficile de retracer la naissance du macaron, ce petit gâteau à base d’amandes, et emblème de la maison Ladurée. Originellement formé d’une seule coque, il semble en tout cas admis qu’il est amené depuis l’Italie par Catherine de Médicis lorsqu’elle rejoint la famille royale française. Il est à l’époque appelé «maccherone», ou «macaroni». Il apparaît même sous la plume de Rabelais.
Mais le célèbre macaron dit «parisien», avec ses deux coques accolées et fourrées de ganache, semble bien être l’œuvre de Pierre Desfontaines, cousin de Louis Ernest Ladurée. C’est bien plus tard que les macarons seront teints de ces tons pastels si reconnaissables pour indiquer aux gourmands les différentes saveurs.
Les années 90, Ladurée devient international
En toute fin du XXe siècle, le savoir-faire et l’atmosphère chargée d’histoire de la maison Ladurée sauront séduire David Holder et son père Francis, fondateur du groupe Holder. En 1993, le groupe rachète et agrandit considérablement l’entreprise. Alors qu’elle réalise avant l’achat, 2,39 millions d’euros de chiffre d’affaires avec seulement 45 employés, trois ans plus tard, elle affiche 3,66 millions d’euros de CA et emploie 140 personnes.
Et ce n’est qu’un début! La plus grande réussite du nouveau président David Holder, depuis sa prise de fonction il y a une quinzaine d’années, est internationale. S’il a commencé par Paris, avec de nouvelles boutiques sur les Champs-Elysées et rue Bonaparte, il traverse la Manche en 2005 pour installer Ladurée à Londres. Et depuis, la marque grignote le monde entier. Au Japon, à New York, São Paulo, Dubaï, Stockholm, Hong Kong… Ladurée perdure et se multiplie aux quatre coins du globe.
Une stratégie marketing habile pour Ladurée
Fait assez rare à notre époque, la marque Ladurée n’a jamais eu recours à la publicité classique. En revanche, elle a su habilement s’associer avec d’autres marques pour concevoir des produits (à durée limitée ou non) qui ont depuis largement dépassé le cadre du macaron. Chocolats, bougies parfumées, figurines de Noël, soins pour le corps, lignes de vêtements, il faut bien admettre que David Holder est un sacré gourmand. Et la recette est bonne!
En utilisant systématiquement un style visuel proche de Versailles, aussi bien dans le packaging des produits que dans la décoration de ses points de ventes, Ladurée a su, presque pudiquement, s’imposer comme un incontournable des produits de luxe à la française.
Aujourd’hui, Ladurée emploie plus de 1800 personnes, dispose de 97 boutiques dans 26 pays différents. Après 157 ans d’existence, le petit artisanat de quartier a bien entendu évolué avec son temps, celui de l’industrie et de la mondialisation. Mais après tout, en macaron comme en affaires, ce qui compte, c’est la durée.