Marque légendaire de couverts et de plats en inox, présente sur toutes les listes de mariage depuis des générations, Guy Degrenne a su se renouveler. Après les arts de la table, la société sous-traite aujourd’hui pour l’aéronautique, le nucléaire ou l’électroménager. Comment cette maison fondée en 1948 est-elle devenue le leader européen de l’emboutissage inox ?
“Mon pauvre Guy Degrenne, ce n’est pas comme ça que vous réussirez dans la vie !” Cette réplique tirée d’une fameuse publicité pour le créateur de couverts présente sur tous les écrans de télévision dans les années 80 évoque avec humour la réussite de ce groupe familial. Or, c’est précisément durant les années 80 que la société connaît la plus importante crise depuis sa création.
L’âge d’or pour Guy Degrenne
L’histoire de la maison remonte à 1948, lorsque Guy Degrenne décide de reprendre la forge paternelle à Sourdeval en Normandie. Son objectif : développer et démocratiser les couverts en acier inoxydable. C’est un succès. En quelques décennies, Guy Degrenne devient leader français des arts de la table et la société s’industrialise. En plus de son usine de Sourdeval, la société construit en 1967 un nouveau site de production à Vire dans le Calvados. Les années 70 sont marquées par le développement de la société sur le marché européen. Que se passe-t-il ensuite ? Quels événements font que le groupe doit se renouveler ? Tout d’abord la concurrence chinoise, puis l’évolution sociétale, le changement de mœurs, tous ces événements conduisent Guy Degrenne à céder sa société en 1987 au groupe Table de France.
Un tournant indispensable
C’est un fait, la société doit se diversifier. Un tournant s’opère, d’un côté on développe les arts de la table et de l’autre on se focalise sur la production industrielle. Ainsi, la solution choisie par les dirigeants est de se tourner vers la sous-traitance. La maison possède en effet un important parc de machines et surtout un savoir-faire en matière de production d’articles en inox. Un seul objectif : trouver des clients. C’est ainsi que Guy Degrenne commence à travailler pour Moulinex, également installé en Normandie. Les ouvriers de Vire fabriquent alors des bols en acier inoxydable pour différentes gammes de robot Moulinex. C’est le début de la reconnaissance, le début de la transition. Le PDG Thierry Villotte explique que cette évolution a été longue et qu’il n’est pas chose aisée de passer des arts de la table à l’emboutissage inox pour l’industrie.
Nouveau département, nouveaux produits
Alors, afin de se donner une nouvelle image et pour s’inscrire dans un nouveau cadre légal, Guy Degrenne crée une nouvelle filiale en 2000 : Guy Degrenne Industrie. Au départ tout se fait par bouche à oreille et en fonction des besoins précis de ces nouveaux clients. Le PDG lui-même devient VRP pour son nouveau département, alors lorsqu’une de ses connaissances qui travaille dans l’aéronautique lui parle de ses problèmes de fournisseurs, la solution est vite trouvée. Ainsi l’offre de production de Guy Degrenne Industrie évolue au gré des demandes des clients, rencontrés pour certains sur des salons, comme au Midest, le salon international de la sous-traitance.
Une offre toujours renouvelée
Mais alors, que fabrique ce nouveau département ? La réponse : des pièces en inox embouties. Plus précisément, Guy Degrenne Industrie produit pour le secteur médical, l’aéronautique, l’agro-alimentaire, l’électroménager, le secteur ferroviaire ou encore le nucléaire des pièces sur-mesure et à la demande. Ainsi sortent de l’usine de Vire des cuvettes de toilette pour le TGV, des conteneurs de transport de déchets radioactifs ou encore des bols pour robots ménagers. C’est ainsi que Guy Degrenne a décroché un contrat avec Vorwerk, groupe allemand distributeur du robot Thermomix. Le succès est tel que pour suivre les ventes du produit, l’usine a dû augmenter de 50% sa capacité de production. C’est avec le soutien d’un nouvel actionnaire, l’industriel Philippe Spruch, entré dans le capital en octobre 2014, que ces investissements ont pu voir le jour.
Leader européen
Guy Degrenne Industrie est ainsi devenu en une décennie leader européen de l’emboutissage inox. Alors que le département en charge des arts de la table – couverts, vaisselle, verrerie – produit essentiellement pour le marché hexagonal, la production industrielle de pièces en inox embouties s’est immédiatement tournée vers une clientèle européenne, et surtout allemande. Et de plus en plus, ce nouveau département compte dans les résultats du groupe. Pour preuve, au 31 décembre 2014, près d’un tiers du chiffre d’affaires global du groupe était généré par la filiale industrielle, soit 30 millions d’euros sur de 85 millions de chiffres d’affaires. Un bel exemple de réussite à la française qui a dû donner matière à réfléchir au proviseur de l’école du petit Guy Degrenne !