Les premiers appareils sont opérationnels et vont entrer dans leur ultime phase de test clinique avant leur mise sur le marché. En un peu moins de quatre années d’existence, la start-up cofondée par Anaïs Barut est sur le point de révolutionner l’imagerie médicale et de sauver des milliers de vies. Portrait d’une jeune entrepreneure de talent.
Trio gagnant
Est-ce le métier de son père, ingénieur parcourant les centrales EDF, qui a suscité chez Anaïs la vocation de la recherche ? Après avoir obtenu un bac scientifique, l’étudiante studieuse et douée hésite alors entre la recherche et l’entrepreneuriat. Passionnée par la science, la jeune femme ne peut pourtant pas entrevoir une carrière en tant que salariée, et s’imagine volontiers comme dirigeante d’entreprise. Le dilemme est tranché puisque ses deux centres d’intérêt seront finalement conciliés, en intégrant dans un premier temps l’Institut d’optique Graduate School de Palaiseau, puis, une fois diplômée, en rejoignant les bancs d’HEC Paris.
Anaïs Barut sera donc ingénieure et entrepreneure, imaginant plusieurs dispositifs assez innovants pour être commercialisés. Elle est épaulée pour cela par David Siret, un autre étudiant de l’Institut d’optique, et tous les deux imaginent d’abord un système permettant de détecter la somnolence au volant. De son côté, Arnaud Dubois, enseignant-chercheur au même Institut d’optique, dépose le brevet d’une invention à peine ébauchée mêlant deux techniques d’imagerie médicale.
La rencontre décisive a lieu en 2013, alors qu’Anaïs rentre tout juste d’un stage effectué à Shanghai. « Nous nous sommes très vite bien entendus, identifiant ce que pourrait être le rôle de chacun ». Pressentie pour repérer les anomalies oculaires ou mammaires, l’innovation d’Arnaud Dubois se montre efficace pour détecter très simplement toutes les formes de cancer de la peau. Les trois complices fondent en 2014 leur propre entreprise, DAMAE Medical, dont Anaïs Barut sera la présidente.
Un procédé immédiatement salué
Si les cancers cutanés se soignent relativement facilement lorsqu’ils sont détectés précocement, ils figurent par contre parmi les plus graves si le diagnostic tarde à être posé. Jusqu’à présent, le dermatologue procède à un examen aidé d’une loupe et peut décider, si un doute apparaît, de faire appel à une biopsie pour déterminer le danger que peut représenter un grain de beauté suspect. Le procédé est long, coûteux, et, comme l’erreur est humaine, un praticien peut passer à côté d’une tumeur sans pour autant la déceler.
OCTAV, comme se nomme le gros microscope mis au point par l’équipe de DAMAE Medical, se pose directement sur la peau et effectue en temps réel un scan d’une précision atteignant le micromètre. L’image qui en résulte est analysée conjointement par le praticien et par un algorithme permettant d’obtenir un diagnostic immédiat. Investie à 100 % dans son entreprise, Anaïs Barut planche tout autant sur les aspects techniques que sur le management, tant et si bien que le projet se fait très vite remarquer. Bpifrance accorde une première participation de 250.000 euros permettant la réalisation d’un premier prototype. Les récompenses s’enchaînent alors, plus d’une quinzaine étant récoltées, menant à une impressionnante levée de fonds effectuée en 2017, d’un montant de deux millions d’euros.
Un début de carrière mené tambour battant
L’équipe de DAMAE, qui compte 14 salariés et qui vient d’emménager dans de nouveaux locaux parisiens, ne devrait pourtant pas s’agrandir, la volonté d’Anaïs étant d’éviter un développement trop rapide risquant de briser l’alchimie qui règne actuellement. Car Anaïs Barut fait preuve, malgré son jeune âge, d’une vision très mature au sujet de l’univers entrepreneurial et du secteur en pleine expansion de la « medtech ».
Cette sportive à l’esprit volontaire et qui porte son projet avec une motivation et un sourire constants devrait bientôt permettre de lutter contre un type de cancer en perpétuelle augmentation, touchant essentiellement les habitants d’Europe, d’Amérique de Nord et d’Australie. Dans ce seul pays, près de deux habitants sur trois seront confrontés à cette maladie impitoyable. Malgré le progrès que constitue l’innovation de DAMAE, il est bon de rappeler, en cette période estivale, que la manière la plus efficace de lutter contre les cancers de la peau reste avant tout la prévention. La prudence dans la durée d’exposition au soleil ainsi qu’une protection adéquate éviteront une maladie qui touche chaque année dans le monde trois millions de personnes.