Deux ingrédients sont indispensables pour produire la Cîroc, la marque de vodka du rappeur Puff Daddy : du raisin des Charentes et le savoir-faire de Jean-Sébastien Robicquet. L’œnologue français s’est fait spécialiste dans la création de spiritueux haut de gamme pour de grands groupes du secteur, mais surtout pour la maison Villevert. Il a ramené à la vie cette ancienne institution cognaçaise fondée par ses aïeux en lui apportant une touche moderne et anticonformiste.
Jean-Sébastien Robicquet grandit sur les bords de la Gironde au milieu des vignobles. Après un DEUG en biologie, il obtient une maîtrise d’œnologie et un DESS en droit économique et gestion de la filière vinicole. À la fin de ses études en 1989, il rejoint la maison Hennessy pour laquelle il travaille près d’une décennie. Sa carrière dans l’entreprise l’emmène à Singapour puis à Cognac où il devient responsable export et marketing de la marque de spiritueux.
Vendre du vin en ligne aux États-Unis
En mars 2001, Jean-Sébastien Robicquet fonde Eurowinegate afin de vendre du vin en ligne aux États-Unis. Malheureusement son activité doit affronter deux grosses tempêtes dans les mois qui suivent. En effet, en juin, il voit tout d’abord la bulle Internet exploser, puis en septembre les Twin Towers s’effondrer avec pour effet immédiat de faire grimper le dollar. Ses ambitions américaines douchées, Jean-Sébastien Robicquet décide de revenir à la fabrication de spiritueux.
Il expérimente ainsi de nouvelles manières de distiller le vin et élabore une vodka à base de raisin. Diageo cherche à l’époque à créer une vodka française haut de gamme. Ceux-ci sont séduits par les méthodes de Jean-Sébastien Robicquet et c’est ainsi que Cîroc naît en 2003. L’ingrédient principal est au cœur d’une controverse : les producteurs de l’Europe du Nord et de l’Est considèrent que seuls les alcools distillés à base de graines ou de pomme de terre peuvent recevoir l’appellation vodka.
Rachat du manoir Villevert en 2009
Toutefois, Cîroc peine sur le marché américain. La marque ne décolle qu’en 2007 quand Diageo s’associe à Sean Combs (Puff Daddy à l’époque). Depuis, Hollywood s’arrache cette vodka ultra-pure et fraîche et, fort de ce succès, Jean-Sébastien Robicquet décide de revenir à ses sources. En 2009, il rachète ainsi le manoir Villevert dont il découvre qu’il a été bâtit au XVIe siècle par ses ancêtres. Ces derniers ont fait partie des premiers négociants en cognac avant même les familles Martell et Hennessy.
En 2015, Eurowinegate devient la maison Villevert. Si ce nouveau nom est dépositaire d’un état d’esprit familial, Jean-Sébastien Robicquet continue à aller contre-courant alors que le cognac est en crise. Il élabore un gin avec du raisin (G’Vine), une tequila vieillie en fûts de Sauternes et de cognac (Excellia), une liqueur à partir de fleurs de vigne (June), et un vermouth à base de Pineau des Charentes (La Quintinye Vermouth Royal) primé à de multiples reprises.
Un entrepreneur non-conformiste et mesuré
Jean-Sébastien Robicquet avoue ouvertement que le « conformisme tue ». Mais bien qu’optimiste dans l’âme, il conserve une certaine mesure. Si son enracinement à la région de Cognac y est pour beaucoup, le décès d’un de ses quatre enfants en 2003 l’a amené à beaucoup relativiser. De plus, pour lui, « le luxe c’est le temps ». Ainsi, chaque année, il part en retraite pour une dizaine de jours, une manière d’engranger de la sérénité avant de poursuivre ses multiples projets.
En quinze ans, Jean-Sébastien Robicquet est passé « d’une planche avec deux tréteaux » à une société de 80 salariés générant 60 millions d’euros de chiffre d’affaires et exportant dans 40 pays. Et ce n’est pas fini car l’entrepreneur projette d’embaucher une vingtaine de personnes supplémentaires et de porter le chiffre d’affaires de la maison Villevert à 100 millions d’euros d’ici 2020. Pour y arriver, il mise sur l’excellence, l’innovation et son amour inépuisable pour le raisin.