En l’espace de deux ans, Victor Lugger et Tigrane Seydoux ont réussi à bâtir un petit empire dans le monde de la restauration. En créant Big Mamma en 2015, ils ont lancé un concept qui a vite pris de l’ampleur. La recette : une cuisine italienne de qualité à prix raisonnable, faite-maison grâce à des produits achetés directement chez les producteurs, sans intermédiaire.
L’idée est sacrément gonflée : vendre une cuisine 100 % italienne faite maison sans être italien dans un marché complètement saturé. Big Mamma, le pari fou de Victor Lugger et de Tigrane Seydoux, est pourtant devenu un succès. En deux ans, ils ont déjà ouvert six restaurants dans Paris et sont passés de deux à quatre-cent employés, en attendant l’ouverture de leur septième lieu, à la station F à Paris. Ce sera le restaurant italien le plus grand d’Europe (3.000 m² de surface), ouvert tous les jours, 24 heures sur 24.
Les deux jeunes hommes de 34 ans se rencontrent alors qu’ils étudient en HEC. Victor est branché gastronomie et Tigrane est issu d’une famille qui est spécialisée dans l’hôtellerie de luxe. Les deux adorent l’Italie, parlent italien et aimeraient se lancer dans la restauration italienne tout en se démarquant. Ils quittent alors leurs jobs respectifs (Victor est à la tête d’une plateforme aidant au financement participatif pour les artistes et Tigrane assiste l’homme d’affaires Stéphane Courbit dans le domaine de la production audiovisuelle, des jeux en ligne ou de l’hôtellerie de luxe).
Ils décident de créer en 2015 à Paris, un concept qui peut paraître simple mais qui est loin de l’être. Reproduire le modèle de la trattoria italienne, la restauration italienne simple et efficace, basée sur des produits peu coûteux et frais, avec comme credo de miser sur le rapport qualité-prix. Le prix des plats est compris entre dix et quinze euros et on peut trouver, comme à Naples, des pizzas basiques entre quatre et cinq euros.
Pas d’intermédiaires
Les trentenaires ont un business-plan qui s’avère très rentable : faire sauter les intermédiaires. Pour cela ils sont aidés par les solides réseaux qu’ils ont noués au cours de leurs premières expériences professionnelles. Ainsi ils prennent directement contact avec des producteurs italiens, basés aux quatre coins du pays et mettent en place leur propre système de logistique pour acheminer les produits d’abord jusqu’à Milan et Naples, les bases relais, puis jusqu’à Paris. Ils sont livrés directement aux restaurants au sein desquels ils sont travaillés sans passer par un laboratoire, ni des centrales de dépôt.
Ces opérations font réaliser des économies conséquentes aux deux jeunes dirigeants qui assurent ainsi s’appuyer sur des produits d’une fraîcheur inégalable. Par exemple, la mozzarella est livrée deux à trois fois par semaine tandis qu’un restaurateur classique n’a qu’un arrivage par semaine ou par quinzaine.
Un staff 100 % italien
Tout est préparé à l’intérieur des restos, ce qui garantit une qualité certaine. Les files d’attente que l’on aperçoit régulièrement devant les enseignes Big Mamma constituent un témoignage parlant de la réussite des deux jeunes entrepreneurs qui peuvent aussi se vanter de bien gérer leur personnel puisque le taux de renouvellement du personnel ne dépasse pas les 3 % (contre 40 % en moyenne pour la restauration parisienne).
Ils misent d’ailleurs volontairement sur un staff 100 % italien, des cuisiniers aux serveurs en passant par les barmans ou pizzaiolos afin d’afficher clairement l’identité italienne du lieu.
Bientôt un Big Mamma en Italie ?
Le guide réputé Gault et Millaut a récemment honoré les deux amis en les titrant « entrepreneurs de l’année ». Ils ont le vent en poupe et les voyants sont au vert. Tigrane Seydoux assure que les restaurants produisent chacun « entre 500 et 600 couverts » par jour en moyenne. Le chiffre d’affaires par restaurant se situe « entre quatre et cinq millions d’euros par an », selon son co-fondateur.
Des recettes qui permettent d’anticiper l’avenir et d’attirer des investisseurs (Xavier Niel, propriétaire de Free, est entré dans le capital) et de tenter d’exporter la marque ailleurs qu’à Paris. Une arrivée en province n’est pas à exclure mais cela ne fait pas partie de la stratégie des deux associés qui lorgnent plutôt sur les grandes villes européennes, Londres en tête.
Ils visent un projet plus fou encore, avec la création d’un restaurant en Italie. Selon eux, le marché est exploitable dans le nord du pays et particulièrement à Milan et leurs employés, autant que leurs clients italiens (20 % de la clientèle), sont emballés par l’idée.