Isabelle Kocher est devenue le nouveau directeur général délégué d’Engie. Retour sur un beau parcours pour assurer la transition vers les énergies renouvelables.
2016 aurait dû être son année et peut-être l’est-elle quand même, d’une manière moins conventionnelle ? Isabelle Kocher devait devenir la première femme à présider une entreprise du CAC 40. Cela avait été entériné, dès l’an dernier, par le conseil d’administration de GDF-Suez désormais rebaptisé Engie. Mais ce ne se fera pas encore cette fois ! Elle accède pourtant au poste prestigieux de directrice générale déléguée, sous la direction de son mentor Gérard Mestrallet, fondateur du groupe.
Isabelle Kocher devient directrice générale déléguée en charge des opérations
Si ce dernier demeure au premier poste de la société, à elle le poste de « patron », la direction opérationnelle de GDF-Suez, avec le titre de directrice générale déléguée en charge des opérations.
Entrée en 2002 dans le groupe, Isabelle Kocher a été portée vers ce poste par Gérard Mestrallet lui-même, lequel à 67 ans devient président honoraire avec une rémunération symbolique.
Isabelle Kocher, née en 1966, a grandi à Versailles dans un cocon très « bon chic bon genre » entourée de polytechniciens, comme son grand-père et 2 oncles, avec piano, sport de compétition et scoutisme. Elle est agrégée de physique, ancienne élève de l’Ecole normale supérieure, et titulaire d’un DEA d’optique quantique et également ingénieure générale des Mines.
Fille de l’ancien directeur financier de CIT Alcatel et d’une exégète, chroniqueuse de radio Notre-Dame également auteur d’ouvrages sur la Bible, Isabelle Kocher est mariée depuis 1989 au polytechnicien Laurent Kocher et mère de 5 enfants âgés de 9 à 23 ans.
Travailleuse assidue, elle débute ses journées à 5h du matin en se mettant au bureau de son domicile avant le petit déjeuner. Ce moment est, dit-elle, une heure idéale pour la réflexion.
Jospin, Bercy, Suez, la Lyonnaise des eaux et Engie
Passée par le cabinet du Premier ministre Lionel Jospin en tant que conseillère pour les affaires industrielles de 1999 à 2002 après avoir géré le budget de la Défense à Bercy, elle entre ensuite dans le groupe Suez. Elle y rejoint son département Stratégie et Développement avant de devenir en 2005 directrice de la performance et de l’organisation. En 2007, elle est nommée directrice générale de la Lyonnaise des eaux puis directrice générale adjointe chargée des finances de 2011 à 2014, avant de devenir la directrice générale déléguée d’Engie en charge des opérations en 2014.
En 2011, elle avait été approchée pour prendre la tête d’Areva et avait rencontré les administrateurs du groupe avant de choisir de rester chez GDF-Suez. Cette rencontre a été déterminante dans sa nomination comme directrice financière. Deux ans après, c’est la nouvelle Banque publique d’investissement qu’elle décline.
Isabelle Kocher a sauvé la gestion de l’eau
Au cours de sa mission, elle a réussi à mener l’OPA à la City sur le groupe britannique Power en concluant les accords locaux nécessaires, ce qui relève de l’exploit pour un groupe toujours détenu à 33% par l’Etat français. Elle a également sauvé la gestion de l’eau qui était en passe de repasser dans les mains des communes en lançant une grande concertation nationale avec Erik Orsenna auprès des élus, consommateurs, associations sur le thème des « idées neuves pour l’eau ».
Aujourd’hui, elle dit que la présence de Gérard Mestrallet est un atout pour l’avenir de l’entreprise car il est en charge de la « Business Dialogue », un groupe de chefs d’entreprises invités, par l’ONU, à participer aux débats climatiques de la COP. Il mène une mission sur le prix du carbone et la décarbonisation de l’économie en particulier. Il devrait également accompagner la prochaine initiative de Ségolène Royal sur la « green tech » française en faveur des entreprises qui développent des technologies liées au développement durable.
Il reste donc en charge de la stratégie et elle des opérations. Du moins, en théorie car il faudra le vérifier dans la pratique. Elle va se consacrer à la transition énergétique d’Engie, dont les comptes 2015 étaient «dans le rouge ». Cela pour en faire un opérateur d’énergies renouvelables. Les « rotations d’actifs vont s’accélérer», selon l’expression de Gérard Mestrallet, et il est déjà question de se séparer des centrales thermiques aux Etats-Unis.
Dégager un capital énergétique grâce au solaire
La montée en puissance du solaire notamment permettrait à Engie d’être capable de tirer son épingle du jeu mondial de la gouvernance des émissions de CO² créé par la COP21. La rentabilité de cette énergie illimitée se profile mais va aussi redistribuer les cartes géopolitiques en permettant à des pays sans énergie fossile mais avec un capital solaire important de dégager un capital énergétique.
Son ambition est de consacrer 1,5 millions d’euros sur 3 ans pour développer l’innovation et le développement de technologies solaires innovantes qui rendront obsolètes les actuels panneaux solaires. Elle imagine des films transparents appliqués sur les vitres des fenêtres ou voiture pour alimenter en énergie et en chauffage notre environnement. Si la France n’a pas de pétrole, une chose est sure, Isabelle Kocher a des idées.