Haute fonctionnaire de l’Etat français, mère de famille accomplie et féministe engagée, Nathalie Loiseau ne cesse de surprendre par sa témérité et son anticonformisme. Refusant de s’aligner sur les dictats sociaux, la directrice de l’ENA exhorte les femmes à sortir des sentiers battus.
Mère de famille et femme de caractère, Nathalie Loiseau a réussi à se frayer un chemin vers les plus hautes sphères de la diplomatie française grâce à un parcours qui laisse admiratif. Entrée à Sciences Po au jeune âge de 16 ans « un peu par hasard », elle continue ses études à l’INALCO où elle apprend la langue chinoise, avant de passer le concours du ministère des Affaires étrangères (MAE) en 1986 – à seulement 22 ans ! Elle entame alors une brillante carrière au quai d’Orsay, durant laquelle elle sera envoyée dans les années 90 en Indonésie, au Sénégal et au Maroc, avant d’intégrer le service de presse de l’ambassade de France aux Etats-Unis en 2002. Elle y géra avec brio la crise diplomatique de la guerre en Irak en 2003, quand la France refusa d’envoyer des troupes pour soutenir l’invasion américaine.
Elle revient en France en 2007 et intègre la direction d’Afrique du Nord du MAE, avant de devenir directrice générale de l’administration du ministère en 2011. Un succès retentissant pour une femme de caractère qui a réussi à se faire sa place au sein d’un ministère réputé pour être éminemment phallocrate.
Nathalie Loiseau deuxième femme directrice de l’ENA
Ministre plénipotentiaire, Nathalie Loiseau accepte un nouveau défi en prenant la direction de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) en octobre 2012. Une décision qui ne manque pas d’audace pour une ancienne étudiante qui souhaitait travailler dans la mode et qui n’a jamais été énarque.
Après Marie-Françoise Bechtel qui avait pris la tête de l’ENA en 2000, Nathalie Loiseau est la deuxième femme à diriger la prestigieuse école française. Avec l’ambition affichée de faire des élèves non seulement des dirigeants brillants mais également de bons managers, elle réforme le contenu de l’enseignement et redessine le redoutable concours d’entrée – réforme désormais en vigueur depuis la fin du mois d’août 2015.
Son cheval de bataille : le manque de femmes au sein de la prestigieuse institution. Elle envisage ainsi de mettre en place des quotas – une mesure de transition qu’elle considère comme un mal nécessaire – pour atteindre la parité aux postes de direction, et revoir la composition des jurys pour lutter contre les discriminations qui peuvent sévir lors de la sélection des candidats et candidates. Si l’ENA a été la première école mixte en 1945, il y a quelques années la gente féminine représentait à peine 40% des candidatures et un tiers des sélectionnés. Les mesures prises depuis l’arrivée de Nathalie Loiseau à la tête de l’école ont permis de faire remonter le taux des femmes sélectionnées à plus de 45% en 2013, un résultat rapide et probant pour cette femme de tête.
Choisissez tout : exhorter les femmes à tout vouloir
S’appropriant la devise de Sainte Thérèse de Lisieux « je veux tout », Nathalie Loiseau y a ajouté « je ne lâcherai rien, je ne renoncerai à rien ». Un crédo qu’elle met en avant dans son dernier livre Choisissez TOUT: « vivre pleinement sa vie, ne pas renoncer avant d’avoir essayé, je voudrais que cela soit possible pour toutes les femmes. (…) Aujourd’hui je voudrais partager ce que j’ai vu et vécu, donner envie à d’autres femmes d’oser, de rêver et de changer le monde ».
Elle invite ainsi les femmes à prendre des risques pour créer une vie à leur propre image, au delà des dictats sociaux. A commencer par celui qui imposerait aux femmes de séparer carrière réussie et vie de famille épanouie. Nathalie Loiseau appelle les femmes, qui représentent 60% des diplômées de master mais seulement 25% des postes de directions, à ne pas hésiter à « tout vouloir » c’est à dire à être ambitieuses aussi bien sur le plan professionnel que privé. Venant d’une famille qui « n’avait d’yeux » que pour son frère, la directrice de l’ENA démontre qu’il est possible de conjuguer brillamment carrière et vie de famille – elle est elle même mère de quatre garçons nés lors de ses missions au Sénégal et aux Etats-Unis.
Une belle leçon de vie alliant audace et humilité, qui s’adresse non seulement aux femmes mais à tous ceux qui auraient besoin d’un brin d’encouragement pour accomplir leurs rêves.