À 29 ans, Thomas Landrain se démarque dans l’univers de la biologie, par sa vision disruptive et sa volonté de mettre la science à la portée de tous. Fervent défenseur du « DIYBio », un mouvement visant à promouvoir la pratique et l’étude de la biologie hors des carcans traditionnels, il est aussi le fondateur du premier laboratoire communautaire de France.
Après un Bac S, il effectue une licence de Biologie à l’Institut catholique d’Etudes supérieures de La Roche-sur-Yon, souhaitant trouver une « alternative à la prépa et à l’université ». Après trois années d’études, il intègre la renommée École normale supérieure (ENS) à Paris, et suit également sur la même période les cours du master de Génétique de l’Université Paris Diderot.
Fort de ces expériences, il part à 21 ans en Finlande effectuer un projet de recherche dans un institut de biotechnologies. Durant 9 mois, il travaille sur la régulation du stress à l’échelle cellulaire dans les organismes des mammifères. Cette expérience est décisive pour la suite du parcours de Thomas. De retour à Paris, il s’applique à poursuivre ses recherches sur le stress cellulaire, bénéficiant des infrastructures de l’ENS.
De l’étude du vivant à sa maîtrise : la biologie synthétique
Souhaitant mettre à profit ses connaissances mathématiques poussées et tourner ses recherches vers une approche plus quantitative que qualitative de la biologie, Thomas se lance dans l’étude de la biologie synthétique. Cette discipline relativement combine à la fois biologie, informatique et modélisation mathématique, induisant une approche systématique. Les travaux menés dans cette direction ont suscité la création de fonctions biologiques, permettant de réaliser des fonctions logiques et prévisibles à partir d’organismes vivants. D’après Thomas Landrain, « Nous [ne sommes] plus dans une phase d’étude de la nature mais véritablement de sa maîtrise. »
Constatant l’absence de laboratoire dédié à la biologie synthétique en France, Thomas crée alors un club avec des amis, dédié à l’étude approfondie de cette discipline. L’équipe prend également part à un concours international organisé par le prestigieux MIT (Massachussetts Institute of Technology). Leur travail sur les bactéries multicellulaires leur rapporte le prix de la meilleure recherche fondamentale et une médaille d’or décernée par le MIT. Cette expérience fondatrice pour le jeune biologiste renforce sa volonté de faciliter les échanges entre la biologie, les mathématiques et la physique, disciplines traditionnellement trop séparées selon lui.
Sa rencontre fortuite avec un physicien de l’École polytechnique apporte à Landrain une opportunité : le Dr. Alfonso Jaramillo lui propose de créer le premier laboratoire de biologie synthétique en France, au Génopole d’Evry, ce qu’il accepte sans hésitation.
La création de La Paillasse, vision innovante de l’avenir de la Science
C’est en 2009 que le parcours de Landrain prend un nouveau tournant : il entend alors parler du mouvement international baptisé « Do-it-Yourself Biology » (DIYBio), une communauté de « biohackers », des individus prônant la pratique de la biologie hors de ses carcans traditionnels. Ces biologistes amateurs ou spécialistes se réunissent dans des laboratoires de fortune, des squats, etc pour travailler sur des projets indépendants.
La découverte du « hacking », cette approche de destruction-création d’une idée à partir de moyens à disposition, séduit Landrain et il réunit autour de lui une communauté souhaitant appliquer les principes du DIYBio. En 2011, le groupe crée le premier biohackerspace, baptisé « La Paillasse ».
Ce lieu unique en France possède tout le matériel nécessaire pour mener un projet de recherche, mis à disposition de tout individu le souhaitant. La Paillasse attire un grand nombre de biologistes en herbe, la plupart issus de parcours non scientifiques (designers, artistes, …). Le principe de cet espace collaboratif est de mettre la biologie et la science à la portée de tous, ainsi que de stimuler l’innovation en facilitant la rencontre entre des profils totalement différents. Physiciens, ingénieurs, designers se retrouvent à La Paillasse pour travailler sur des projets comme la création d’un stylo bioréacteur, des technologies biodégradables…
Thomas Landrain est aujourd’hui l’un des porte-parole les plus éminents du biohacking, promouvant cette discipline à l’international et souhaitant créer un réseau européen de biohackers, qui rendrait possible des projets menés à l’échelle européenne.
La vision de Landrain rejoint l’un de nos grands axes évolutifs des dernières décennies : l’interdisciplinarité. L’innovation n’est pas uniquement le produit de quelques génies isolés, mais en majeure partie la recombinaison de technologies existantes, issues de secteurs différents. Son objectif pour 2014 est de créer un espace hybride, à mi-chemin entre un institut de recherche traditionnel et un hackerspace, à la disposition de tous, et permettant à une communauté d’amateurs à la fois d’apprendre, mais aussi de contribuer à la biologie en exprimant leur créativité et combinant leurs capacités pour mener à bien des projets innovants.
C’est un enjeu considérable. Joël de Rosnay a écrit sur le sujet, pour dire notamment son inquiétude face au retard de la France. Cette création d’un laboratoire communautaire pour les biotechnologies est une formidable nouvelle.
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